Près de quatre ans après l’irruption de la crise du Covid, le paysage du travail à distance semble subir une métamorphose. Si les travailleurs défendent ardemment ce droit qu’ils estiment acquis, les employeurs préconisent un retour graduel au présentiel, accentuant ainsi la pression sur le monde professionnel. Cette tension pourrait s’accentuer en 2024.
Le télétravail, phénomène de société majeur, subit des hauts et des bas. Bien qu’une bonne part des employés y voie l’avantage d’être un peu comme un travailleur indépendant et de pouvoir trouver un nouvel équilibre entre temps passé pour les obligations professionnelles et pour la vie personnelle, les modalités du travail à distance font face à une remise en question.
Outre Atlantique, les grands noms de la Tech, pourtant à l’avant-garde du télétravail, opèrent un revirement. Apple, Google, Amazon, Meta, Zoom et même Salesforce rappellent leurs salariés au bureau, invoquant la productivité.
Les entreprises françaises, avec un léger retard, leur emboîtent le pas en demandant à leurs employés de travailler plus fréquemment en présentiel, imposant parfois un nouveau rythme de travail.
Une étude OpinionWay révèle des divergences notables. Alors que 62 % des travailleurs intellectuels aspirent à télétravailler 2 à 3 jours par semaine, 68 % travaillent principalement au bureau. Seuls 13 % travaillent effectivement à distance trois jours ou plus par semaine, mettant en lumière une disparité entre les souhaits des employés et les directives des employeurs.
Les Français, toutes tranches d’âge confondues, aspirent à trois jours de travail à distance par semaine. Une vision en contradiction avec les directives actuelles des employeurs. 82 % des entreprises incitent au retour au bureau, et 71 % imposent un certain nombre de jours sur site, générant déjà des préoccupations sur une potentielle baisse de productivité pour 30 % des employés.
D’après une étude européenne de SAP Concur, 70 % des salariés accepteraient de revoir à la baisse leurs prétentions salariales en échange d’un maintien du télétravail. Les motivations des travailleurs pour retrouver le bureau sont avant tout financières, avec 70 % citant des avantages, tels que le remboursement des frais de transport et la prise en charge des repas.
L’espace de travail évolue également avec l’ère du travail hybride. Les travailleurs souhaitent un bureau modulable (58 %) et convivial, favorisant des moments de « team building » (58 %).
Dans cette dynamique, 66 % estiment que l’IA pourrait stimuler leur productivité, en particulier dans la recherche d’informations (77 %), la synthèse de réunions (72 %), l’analyse des résultats en temps réel (67 %) et la création de contenus (65 %).
L’année 2024 pourrait bien marquer une (r)évolution dans le monde du travail. Selon le « Flex Report: 2024 Predictions » de Scoop, « les deux tiers des entreprises américaines envisagent d’offrir une plus grande souplesse en permettant le télétravail quelques jours par semaine ».
Cependant, cette tendance n’est pas universelle. Selon l’étude mondiale KPMG « 2023 CEO Outlook », les dirigeants européens manifestent une certaine méfiance vis-à-vis du travail à distance. Ils craignent une baisse de productivité de 10 % à 20 %.
Il reste à savoir si des facteurs externes, tels que les Jeux olympiques de 2024 ou les incitations gouvernementales, peuvent rééquilibrer la balance en faveur d’une flexibilité réelle dans le travail.